6 - Lundi 11 avril – Les nouvelles ne sont pas bonnes…

Lundi 11 avril, Montréal – Les nouvelles ne sont pas bonnes…Cette fois, je suis partie tôt le matin.  Sur place, je rejoins Michel qui m’attend dans le stationnement.  Je ne souhaite à personne d’être malade, mais si vous le deveniez, tentez par tous les moyens d’être référés au CUSM.  Ce centre médical est hallucinant d’efficacité et de bonté.  On arrive, on s’inscrit en deux secondes sur l’écran numérique avec sa carte santé; en cinq minutes, on est dans une salle d’examen.

Dr Montreuil, le médecin résident, est le premier à me joindre, les photos de Gaspard sont sur son écran.  Oui, la masse maudite a maintenant un nom :  Gaspard, le renard.  Après tout, il faut être rusé comme un renard pour venir élire domicile sournoisement sur mon genou sans y avoir été invité et sans donner le moindre signe.  J’ai la ferme intention de me débarrasser de ce squatter à la fois importun et indésirable.

1er MRI de l'aventure

 
Dr Montreuil décrit la masse qui, je l’avoue, impressionne de par sa taille; 6 cm x 5.5 cm – côté droit de l’image (j’oublie de demander sa profondeur).  Pas étonnant qu’il n’y ait pas assez de place dans mon genou et que ma peau et mes muscles n’apprécient pas être tiraillés par la pression indue.  Dehors l’intrus!

Sans surprise, Dr Montreuil précise qu’il faudra faire une biopsie pour analyser de quoi se compose Gaspard. Dr Aoude,[1] le chirurgien orthopédiste et oncologue, se joint à nous et confirme la nécessité d’une biopsie.

Cependant, la chanson a changé… Dr Aoude se dit maintenant très inquiet.  L’image corrobore le diagnostic du sarcome. Avant que j’aie eu le temps de respirer, il indique qu’il me faudra de la radiothérapie et une chirurgie.  Pendant que mon cerveau tente de trouver une explication à savoir pourquoi ce n’est pas un hématome, ils font erreur c’est sûr, Dr Aoude souligne deux défis supplémentaires.  Gaspard est près de vaisseaux importants, ce qui compliquera la chirurgie.  Par ailleurs (côté droit de la photo), Dr Aoude note que l’os présente une section où l’ombrage est plus pâle.  Cela pourrait vouloir dire que l’os est aussi atteint, il devra consulter le Tumor Board (c’est fou comme ce titre me rassure!... Not!!)  Si l’os est effectivement atteint, il faudra aussi en enlever une partie lors de la chirurgie.  Dr Aoude ajoute qu’il veut un PET scan rapidement pour voir si les poumons sont affectés.  Nul besoin de m’expliquer que des taches sur les poumons seraient synonyme d’une complexité supplémentaire, j’ai bien compris.

Il y a sûrement des questions intelligentes à poser, mais pour le moment, les miennes me semblent bien insignifiantes.  Une peut-être : peut-on faire la biopsie aujourd’hui?  Oui.

Qu’est-ce qui cause les sarcomes?  On ne le sait pas, mais ils ne représentent que 2 % de tous les types de cancers.  Yeah! Une autre statistique plate pour mon histoire plate! 

J’ai une blessure d’usure à la hanche qui aurait dû demander une infiltration de cortisone, j’attends le rendez-vous bientôt, puis-je procéder?  Non, mieux vaut attendre pour le moment.

Est-ce qu’il y a des « does and dont’s »? Non.

Humm… quoi d’autre?  Pendant que je réfléchis, Dr Aoude me demande comment j’ai senti la masse grossir?  En fait, étrangement, je ne l’ai jamais sentie grossir.  J’ai réalisé sa présence ce fameux matin de décembre en faisant du spinning en raison de la douleur.  Gaspard y était peut-être installé depuis longtemps, je n’en sais rien, mais ce matin-là, il avait choisi de se faire entendre ou plutôt sentir. J’explique alors le type et la fréquence de mes entraînements.

Dr Montreuil et Dr Aoude échangent un regard.  Peut-être est-ce un hématome et non un sarcome?  Voilà!  C’est ce que je disais, une blessure de guerre!

« Un hématome est une collection de sang se formant dans une cavité naturelle ou à l'intérieur d'un tissu, à la suite d'une hémorragie. Il résulte d'un traumatisme, d'une rupture vasculaire ou d'un trouble de la crase sanguine. » (https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9matome)

La biopsie sera donc la clé pour déterminer les prochaines étapes.  Dr Aoude nous quitte, Dr Montreuil prend la relève en faisant les arrangements avec l’infirmière, la dévouée Mme Josée, pour organiser la procédure sur place dans la salle d’examen.

Il est passé 14 h et il faut savoir que Mme Josée n’a eu ni pause, ni lunch depuis le début la journée, elle est fatiguée, on le serait à moins. Bien qu’elle souhaite aller chercher une petite bouchée, elle accepte de procéder immédiatement et prêter assistance à Dr Montreuil pour la procédure. Une sainte du système de la santé!

On demande à Michel de sortir de la pièce, stérilise la région touchée, procède à l’anesthésie locale, attend quelques minutes et le tour est joué.  Dr Montreuil manipule avec ses doigts de fée cette longue aiguille dont le son rappelle les « clac-clac » d’une cisaille.

 

Appareil pour biopsie

(https://www.mayoclinic.org/diseases-conditions/soft-tissue-sarcoma/symptoms-causes/syc-20377725)

 

Il s’applique à extraire des carottes de la masse. Au début, il extrait beaucoup de sang et s’interroge tout haut à savoir si c’est un hématome.  Je prends note de son interrogation avec un sourire en coin.

À plusieurs reprises, il partage sa joie avec Mme Josée : « Ah!  Ça, c’est une bonne… encore une autre bonne. »  Sa récolte de carottes semble fructueuse (Dieu merci, aucun lapin affamé en vue), mais la plaie saigne beaucoup.  Il faudra des points de suture.  On me donne des instructions, accompagnées d’un « kit de survie » (des pansements supplémentaires) et on m’amène dans une autre pièce pour une prise de sang.

Dr Montreuil me laisse en disant que si j’ai mal plus tard, seules des Tylenol sont permises, il ne faut surtout pas éclaircir le sang.  Pas de souci, je suis dure au mal, des analgésiques ne devraient pas être nécessaires.

La prise de sang se déroule sans anicroche.  Le moment est venu pour moi de reprendre la route vers Gatineau.  Michel a tenu à rester avec moi jusqu’à la fin des procédures, même si je lui répète depuis un moment que tout va bien, il peut retourner à ses activités, mais fidèle à lui-même, il reste avec moi.  Je lui en suis reconnaissante.

Autoroute 417 Ouest, Schnout!… l’anesthésie locale se dissipe.  Non, non, pas de problème, elle est dure au mal qu’elle disait la madame… Les élancements sont intenses, mais ma jambe droite, c’est la « colonelle » des pédales, pas moyen de mettre ma jambe sur le banc d’à côté, question de relaxer.  Le voyage de retour me semble infiniment long, malgré la pesanteur de mon pied sur l’accélérateur.

À la maison, j’examine la plaie ou plutôt le pansement, Mme Josée m’a demandé de surveiller les saignements, ça ne semble pas trop mal.

Point de suture et pansement

 

Ouais… Nous sommes le lundi 11 avril 2022. Je reviens de Montréal.  Les nouvelles ne sont pas bonnes…

 


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